OUVERTURE DU GRAND TIVOLI D’HIVER
Troyes octobre 1836
Les pompes de l’Eglise française n’ont eu qu’un jour de durée parmi nous ; ce pauvre diable de Lejeune, qui voulait rivaliser avec MM. Châtel et Auzou, élever autel contre autel, et ceindre à son tour, la mitre pontificale, s’est vu juger et condamner pour les délits les plus vulgaires. L’apôtre est maintenant en prison, il ne pouvait être mieux placer pour prêcher ses doctrines de réforme. C’est vraiment grand dommage ! tous les amis du plaisir eussent été charmés de voir messire Lejeune, disant sa prétendue messe, psalmodiant ses vêpres, débitant ses homélies et donnant l’absolution à tout le monde. On eût aimé à le voir marchand escorté de son bedeau, de son sacristain et de ses enfants de chœur, accomplir jusqu’au bout une pasquinade trop burlesque pour qu’elle pût être considérée comme bien scandaleuse. Les magistrats qui ont condamné Lejeune, étouffé sa doctrine naissante et fermé les portes de son église, ont porté atteinte à nos amusements, et nous pouvons les considérer comme des ennemis de la gaité publique.
Heureusement voici de quoi bannir nos regrets : le temple de Lejeune se change en salle de bal, il sera ouvert demain, sous le titre de Grand Tivoli d’hiver.
Il y aura grand bal à grand orchestre, on y trouvera toute sorte de rafraichissements ; l’ordre, la gaîté, l’harmonie, la galanterie la plus exquise régneront dans ces lieux. Ce sera un véritable Elysée.
Le Tivoli d’hiver est situé rue du Coq et rue e Bois, près la porte de la Madeleine. Les égards dus au sexe, exigeaient que l’entrée fût libre pour les dames ; on a su allier le sentiment de l’égalité avec le respect pour les convenances, en fixant le prix d’entrée à dix centimes le prix des billets d’entrée pour les hommes. Ces billets serviront en outre pour une contredanse ou pour une valse…
La plus honorable ambition tourmente le fondateur du nouvel établissement… il n’aspire à rien moins qu’à offrir à MM. Les membres de tous les corps d’état e la ville de Troyes, une salle de danse digne d’eux et capable de satisfaire le bon goût dont ils font preuve dans le choix de leurs amusements. Il leur offrira les contredanses les plus nouvelles, les quadrilles les plus variés, avec des coups de pistolet et des chaises cassées pour marquer la mesure ; on y entendra retentir les notes mélodieuses du cornet à piston, qui enlèvent les jeunes filles et qui font palpiter leur cœur avec tant de vivacité ; enfin il veut que l’on dise un jour de lui : Voilà le Musard de Troyes.
Accourez donc, jeunes beautés, préparez votre bonnet le plus élégant et votre robe la plus blanche, chaussez votre escarpin le plis léger, Tivoli va s’ouvrir, la walse (sic) et la contredanse vont commencer.
Article non signé publié dans » le journal de l’Aube » le 9 octobre 1836
Angle rues du Coq et du Bois devenues rues Paillot de Montabert et rue du Général de Gaulle
A suivre…
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