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mardi 17 décembre 2019

Climat politique à Troyes au mois de mai 1833


Lettre adressée à M. André Marchais,
9, rue Louis le Grand à Paris


Troyes, le10 mai 1833
J’ai reçu mon cher ami, hier à Troyes la lettre par laquelle tu me convoques chez toi, voilà mon motif d’excuse pour avoir manqué à la réunion.
Je me suis sauvé de Paris beaucoup plus vite, que je l’avais cru d’abord et les embarras du départ m’ont empêché d’aller te voir.
J’ai trouvé la ville de Troyes diablement tiède mais il y a de bons éléments que je vais tacher de réchauffer. Pour cela j’ai commencé par ce qu’il y a de plus influent et je me suis mis en demeure de convoquer l’Association de la presse qui votera tout ce que je lui demanderai.
J’ai déjà trouvé un brave homme qui se chargera de couvrir à lui tout seul la cotisation que j’ai votée. J’utiliserai sa bonne disposition. Ma réunion est indiquée pour mercredi prochain.
Je te serais bien obligé de m’envoyer d’ici là le procès-verbal de nos délibérations à l’adresse de M. St Amant, rédacteur du Progressif de l’Aube à Troyes.
Tu ferais bien de me joindre aussi les renseignements nouveaux que tu peux avoir sur l’étendue de l’association.
Il est question aussi d’une plus grande extension à donner à notre petit journal qui entre complétement de nos idées. Ce projet de correspondance serait admis ici avec enthousiasme et pour ma part j’y ferai de mon mieux.
Tu me diras quel effet produit la circulaire, ici on la trouve fort bien et plutôt encore trop forte que trop faible.
La gravité qui y règne est fort du goût de nos hommes les plus avancés et je me félicite du résultat. Ce sera un bon coup de fouet de donné à l’association.
La fête de Louis Philippe s’est passée ici au gré de mes vœux. Ceux qui veulent voir ont pu se convaincre du refroidissement complet des sympathies qui dans le premier temps avaient été si vives.
Si tu avais des nouvelles de notre grand marchand de bois tu m’obligerais bien de m’en donner. Je lui ai écrit par Chevallon mais il ne m’a pas encore répondu.
J’ai voulu batailler ici sur les attributions municipales mon premier article se trouve tout net en contradiction avec La Tribune et j’en ai promis un second.
Le diable se mêle de l’affaire mais je ne puis renoncer à mon opinion.
Le journal ministériel m’attaque presque quotidiennement. J’ai supporté longtemps ses cris mais je ne sais si j’y tiendrai.
Je crois que je vais prendre le parti de lui donner quelques croquignoles mais par malheur il est trop bête.
Je suis encore ici jusqu’au 25, époque à laquelle je retournerai à Paris. Je me divertis que fort médiocrement mais pour que l’affaire marche j’y mettrai tous mes soins. Entre nous ton collègue M. Stourm a perdu considérablement de son crédit ici.
Mon cher ami,  réponds moi de suite.
Tout à toi.


Benjamin Pance

André Marchais était le secrétaire de l'association Aide-toi, le ciel t'aidera. Société de tendance libérale fondée au mois d'août 1827 dans le but d'agir sur le corps électoral par des correspondances et des publications. Elle était ainsi destinée à la formation politique des électeurs pour les législatives annoncées en novembre et à coordonner l’action des libéraux, tant monarchistes (doctrinaires) que républicains (démocrates), afin que l'opposition obtienne un maximum de sièges. 

François Benjamin Pance, préfet républicain sous la Deuxième République d'origine auboise

Né le 22 nivôse an 8 (17 janvier 1800) à Boulogne Billancourt ; mort le 15 mai 1851 à Nice. Conspirateur carbonariste et militant républicain sous la monarchie de Juillet, avocat, écrivain, journaliste, préfet.
Fils de François Pance, notaire public à Boulogne-Billancourt, et de Romaine Viault originaire de Rigny-le-Ferron dans l’Aube, François Benjamin Pance séjourna avec sa mère dans l’Aube après le décès de son père en 1811, puis il intégra le collège Sainte Barbe à Paris. Il y eut pour condisciples Guinard, futur major général de la Garde nationale de Paris, Thomas, futur directeur-gérant du National et Godefroy Cavaignac, qui allait devenir le principal dirigeant de l’opposition républicaine après 1830. Il évoqua cette période de sa vie dans le premier tome de Paris révolutionnaire, dans le chapitre consacré aux étudiants.
Il participa à la conspiration civile du 19 août 1820. Membre de la loge maçonnique des Amis de la vérité et président d’une vente de la Charbonnerie, il fut poursuivi au procès de Colmar en 1822.
Durant les premières années de la monarchie de Juillet, il édita de petites publications destinées à l’éducation politique du peuple pour lesquelles il reçut avec Étienne Cabet* 60 F du Comité central de l’Association pour la liberté de la presse en juillet 1833.
De retour à Troyes dans le courant des années 1830 pour y exercer son métier d’avocat, il devint l’éditorialiste du journal Le Progressif de l’Aube et figura au nombre des défenseurs des accusés d’avril 1835.
Après la Révolution de février 1848, il se porta candidat à la Constituante dans l’Aube et obtint un score honorable de 8 000 voix mais ne fut pas élu. Les républicains locaux demandèrent alors sans succès sa désignation comme délégué du Gouvernement. Il fut nommé préfet de la Haute-Marne de juin à juillet 1848, puis préfet de la Sarthe de juillet 1848 à novembre 1849 avant d’être remercié : il avait reçu plusieurs avertissements pour ne pas avoir exercé une surveillance bien active à l’égard du parti exalté.
François Pance mourut à Nice en 1851.

(extrait du "Maitron")

Pour confirmer, les liens de Pance avec les républicains troyens voici une lettre adressée par Benjamin François Pance à Jean François Gadan le 13 mars 1848



Mon cher citoyen,

Nos lettres se croisent comme nos personnes. La mienne vous doit être actuellement parvenue. Et je n’ai que le temps d’ajouter quelques mots à ce que je vous disais. J’accepte de grand cœur la candidature du parti républicain. Je ne vous fais pas de profession de foi, je craindrais de me rendre ridicule. Ce que j’étais à Belfort en 1822, à Paris en juillet 1830 et en février 1848 je le serai toute ma vie trop heureux d’avoir encore de bonnes et vigoureuses années à sacrifier au service de ma patrie et de la république.

Je fais ici partie du comité central républicain radical qui se mettra en correspondance avec vous et auquel déjà vous pouvez écrire à la salle du boulevard Bonne-Nouvelle puisqu’il est en permanence et trop heureux de tous les renseignements qu’il reçoit. Mettez si vous voulez le nom de M. Clément Thomas sur l’adresse.

J’ai vu hier Millard qui me cause le regret de ne pas vouloir se porter candidat ; il m’a donné des raisons que j’ai vainement combattues. Il m’a dit qu’il écrirait dans ce sens et qu’il prierait surtout ceux qui auraient voulu le nommer de porter leur voix sur moi.

Il me tenait le plus possible au courant de ce qu’il savait sur Troyes et c’est ce qui m’avait fait vous écrire. Je lui ai promis d’aller à Troyes aussitôt que nos élections de la garde nationale seront faites c’est-à-dire le 22 mars prochain. Jusque-là tenez moi au courtant et dites-moi tout ce qui concerne les élections et les intérêts du département de l’Aube.

Adieu mon cher Gadan, que cette lettre vous soit commune avec nos amis.


Salut fraternité et confiance


B. Pance
 

mercredi 5 avril 2017

Napoléon par J S Saint-Amant 1825


 J S Saint-Amant co-auteur en 1825 de ce "Précis de l'histoire de Napoléon" a été troyen de 1831 à 1836, il était le fondateur du journal "Le Progressif de l'Aube", du "Précurseur de l'Aube et de l'Yonne", animateur de clubs d'opposition et particulièrement suivi par la police.
JS Saint-Amant était né à Paris,  Jean-Amant Soleil. Homme de lettres, lié avec les associations "Aide toi le ciel t'aidera", " pour la liberté individuelle et pour la liberté de la presse", il fonda des journaux à Buenos-Aires entre 1826 et 1828 et après son séjour troyen où il côtoya le commandant de la garde nationale Perrot-Prailly et le journaliste Benjamin Pance, futur préfet républicain, il se rendit en 1836 au Brésil avec sa femme et sa fille.

samedi 25 mars 2017

Troyes, ville hospitalière : l'accueil des réfugiés polonais en 1833

 

Publication dans Le Progressif de l’Aube du jeudi 1er août 1833

Le comité de secours pour les réfugiés Polonais vient d’adresser la lettre suivante à un grand nombre de citoyens :
« Monsieur,
Notre ville a été assignée comme résidence à seize Polonais, débris infortunés d’une héroïque armée. Qui d’entre nous n’a un parent, un ami qui ne lui ait vanté les bienfaits qu’il a reçus en Pologne ? Qui ne connaît l’ancienne et profonde sympathie qui unit les enfants de cette généreuse nation à la nôtre ?
La France ne peut être insensible à de tels souvenirs : elle veut, elle doit rendre douce la terre d’exil à ces malheureux  proscrits.
Mais pour être efficaces, les secours doivent être recueillis et distribués avec discernement. Il a donc été formé à Troyes, sous la présidence de M. le maire de la ville, un comité spécial de secours pour les réfugiés polonais. Des commissaires délégués par lui recueilleront à domicile des souscriptions qui seront, ou l’engagement d’opérer chaque mois un paiement déterminé, ou la remise immédiate de sommes une fois données.
Tous sont appelés à concourir à cette œuvre de bienfaisance ; devant elle, doivent se fondre en un accord unanime toutes les nuances d’opinions. Le superflu du riche et le denier de la veuve sont également honorables à recevoir et à donner : nous frapperons à toutes les portes.
Nous osons espérer, monsieur, que non seulement vous répondrez personnellement à notre appel, mais encore que vous nous aiderez de votre influence et de vos soin s, et nous faciliterez l’accomplissement d’un tâche qu’il nous sera précieux d’avoir remplie avec quelque fruit.
Dans l’espoir que vous partagerez nos sentiments, nous avons l’honneur de vous saluer.
Le maire de la ville de Troyes, président, PAYN.
Le colonel de la garde nationale, vice-président, PERROT-PRAILLY. »

1833 Troyes se mobilise pour les réfugiés polonais





Comité de secours en faveur des Polonais

Hier, sur l’invitation de M. Perrot, colonel de la garde nationale, une assemblée a été tenue à l’Hôtel-de-Ville sous la présidence de M. le maire. Elle avait pour objet la création d’une commission destinée à régulariser l’obtention et la répartition des secours que réclame la position malheureuse des Polonais résidant en nos murs et qui commandent à la France ses souvenirs et ses sympathies.
M. le Maire de la ville de Troyes a été nommé Président, M. Perrot, Vice-Président ; M. Couturat, Trésorier ; M. Nicol, secrétaire ; huit commissaires leur ont été adjoints, ce sont  :
MM. Goussier, Pelée de St. Maurice, Baudin-Anheim, Delaffertey, Cénégal, Cardon, Millard, Tatin.
Un premier appel a été fait à l’assemblée composée de 28 personnes, il a produit 140 fr.
Tout fait espérer que les soins de la commission nouvellement créée sauront apporter des soulagements efficaces aux braves et infortunés proscrits.

Publié dans Le Progressif de l’Aube du jeudi 25 juillet 1833  Troisième année n°502 dont le gérant-rédacteur était M. J.S. Saint-Amant.

Parmi les participants on remarque des libéraux de tendance républicaine : le colonel Perrot est le pharmacien appelé aussi Perrot-Prailly, Nicol Eloi-Théophile est un commis greffier du Tribunal d'instance de Troyes,  Millard Jean sera élu député de l'Aube en 1848.